Une circulaire présente le plan d’action devant pallier le manque de professionnels dans les établissements et services médico-sociaux cet été. Pour le juriste Olivier Poinsot, ce texte "tend à faire assumer la continuité de leur activité" aux structures alors qu’elles n’en ont pas l’obligation.
Face à la pénurie de personnels dans les établissements et services médico-sociaux (ESMS), une circulaire du 30 juin 2022 détaille les mesures que doivent prendre les directeurs généraux des ARS et les préfets de région et de département pour « garantir la continuité de service » pendant l’été suite aux récentes annonces du ministre des Solidarités, de l’Autonomie et des Personnes handicapées.
Elle rappelle que les remontées des structures font état de tensions fortes cet été en particulier en Ehpad mais aussi dans les services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) pour personnes âgées et handicapées.
Le « plan d’action » présenté pour renforcer les effectifs « s’appuie sur les expertises, les initiatives et les gouvernances déjà existantes au niveau local et a pour objectif de les renforcer afin de faciliter leur effectivité », indique la circulaire interministérielle.
Ainsi, les agences régionales de santé (ARS) sont encouragées à réactiver les dispositifs de coordination mis en place pendant la crise sanitaire ou dans le cadre des campagnes de recrutement d’urgence, pour organiser les renforts RH des ESMS qui en font la demande.
Cette coordination doit permettre de créer des « pools » de remplacement, l’embauche d’étudiants aides-soignants et infirmiers ou la mobilisation de filières gériatriques.
Pôle emploi est également sollicité pour intensifier son appui en développant le recours aux immersions professionnelles des demandeurs d’emploi dans les ESMS ou les dispositifs de recrutement associés à des formations.
Par ailleurs, toujours pour élargir le vivier de professionnels intervenant au sein des ESMS, le texte autorise les structures à recourir, jusqu'au 30 septembre, à des contrats de vacation de gré à gré avec des professionnels médicaux et paramédicaux libéraux ou exerçant en centre de santé. Leur rémunération s’effectue au forfait à la demi-journée.
La circulaire rappelle aussi que les Ehpad peuvent recourir aux professionnels de l’hospitalisation à domicile (HAD) dont les conditions de recours sont assouplies.
Par ailleurs, elle charge les directions régionales de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (Dreets) d’accélérer « le processus de diplomation » via la validation des stages ou la tenue des jurys d’examen, « afin de permettre à un maximum de professionnels de pouvoir exercer durant la période estivale ». De même, les attestations de réussite de diplômes aux étudiants en travail social doivent être délivrées rapidement.
Enfin, dans la fonction publique hospitalière (FPH), la circulaire rappelle qu'une majoration exceptionnelle des heures supplémentaires est proposée aux personnels non médicaux des ESMS jusqu’au 15 septembre.
Un arrêté du 12 juillet 2022 prévoit d'ailleurs une majoration exceptionnelle des taux des indemnités horaires pour le travail normal de nuit ainsi qu’une majoration pour travail intensif dans la FPH.
La circulaire précise que si des ruptures d’activité manifestes venaient à se produire, les ARS et les Dreets devront en informer immédiatement la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS).
Selon le juriste Olivier Poinsot (juriste au cabinet ACCENS AVOCATS CONSEILS), le dispositif décrit par la circulaire « tend à faire assurer, par les ESSMS, la continuité de leur activité pendant la période estivale ». Or, selon lui, « à l’exception des établissements et services relevant d’une personne publique et de ceux qui sont investis d’une mission de service public (…), les ESSMS de droit privé ne sont pas assujettis à une obligation de continuité d’activité ».
Il rappelle que le Conseil d’État a, dans un arrêt du 30 décembre 2020, « très clairement indiqué que ces ESSMS n’exercent pas une mission de service public ».
En outre, « ni le texte fondamental relatif aux missions des ESSMS (article L. 311-1 du code de l’action sociale et des familles ou CASF), ni celui relatif à la définition des ESSMS (article L. 312-1) ne prévoient une telle obligation », rappelle-t-il.