La loi Avenir professionnel du 5 septembre 2018 a opéré une nouvelle réforme de la formation professionnelle. Détail des changements entrés en vigueur le 1er janvier 2019.
CPF monétisé
Chaque compte personnel de formation (CPF), tout d’abord, sera crédité de 500 euros par an et par salarié à temps plein avec un plafond de 5 000 euros. L’alimentation du compte sera renforcée pour les actifs n’ayant pas un niveau V de qualification (800 euros plafonnés à 8 000 euros). Les heures accumulées au titre du CPF et du droit individuel de formation (DIF), seront, elles aussi, monétisées. Selon le décret du 14 décembre 2018, l’unité de mesure sera 15 euros. Concrètement, au 1er janvier 2019, un salarié qualifié pourra convertir au maximum 72 heures de CPF acquises depuis le 1er janvier 2015, soit un solde de 1 080 euros. Il pourra également convertir au maximum 120 heures inscrites en marge du CPF au titre du DIF et mobilisables avant le 1er janvier 2021, soit 1 800 euros. Au total, un tel salarié bénéficierait donc d’un solde de 2 880 euros. Lors du traitement des déclarations annuelles de 2018, entre janvier et avril 2019, les 24 heures acquises au titre 2018 seront ajoutées et le compte affichera 360 euros supplémentaires, soit au global 3 240 euros.
CPF de transition
Autre nouveauté : le congé individuel de formation (CIF) disparaît au profit du CPF de transition professionnelle. Selon le décret du 28 décembre 2018, il reprend les conditions d’ancienneté minimale en vigueur pour le CIF, à savoir au moins deux ans consécutifs ou non, dont un an dans la même entreprise pour les salariés en CDI. La rémunération dépendra, elle, du salaire mensuel brut du salarié.
Dans les entreprises de 50 salariés et plus, la rémunération sera versée mensuellement au bénéficiaire par l’employeur qui sera remboursé dans un second temps par la commission paritaire interprofessionnelle régionale.
Dans les entreprises de moins de 50 salariés la rémunération sera versée directement par la commission paritaire interprofessionnelle régionale afin "de simplifier et d'alléger les démarches des PME".
Pro-A : pour les salariés ayant une qualification inférieure au niveau II
Par ailleurs, la loi Avenir professionnel instaure, à compter du 1er janvier, un nouveau mécanisme de reconversion ou promotion par alternance, surnommé "Pro-A". Il se substitue à la période de professionnalisation. Selon le décret du 24 décembre 2018, il est réservé aux salariés qui n’ont pas atteint un niveau de qualification sanctionné par une certification professionnelle enregistré au répertoire national des certifications professionnelles et correspondant au grade de licence. Objectif visé ? "Atteindre un niveau de qualification supérieur ou identique à celui détenu par le salarié". Initialement, ce dispositif devait concerner les salariés dont le niveau de qualification était inférieur ou égal au niveau III (BTS).
Plan de développement des compétences
Au 1er janvier 2019 également, le plan de formation devient le plan de développement des compétences. L’employeur reste tenu d’assurer l’adaptation des salariés à leur poste de travail et de veiller au maintien de leur capacité à occuper un emploi. En revanche, il n’a plus à construire son plan en fonction des deux catégories actuelles, "adaptation et employabilité" et "développement des compétences". Désormais, le régime de l’action (temps de travail, rémunération) diffère lorsqu’il s’agit d’une formation obligatoire ou non obligatoire. Ainsi, la nouvelle distinction s’opère entre :
Ces formations non obligatoires peuvent être réalisées en dehors du temps de travail sans maintien de la rémunération à condition qu'un accord collectif l'autorise ou, à défaut, que le salarié ait donné son aval. Dans ce cas, l’accord écrit du salarié sera requis et pourra être dénoncé par ce dernier dans un délai de huit jours à compter de sa conclusion, en l'absence d'accord d'entreprise ou de branche (décret du 24 décembre 2018).
Entretien professionnel
Avec la loi Avenir professionnel, l’entretien professionnel subit, lui aussi, un lifting. Si ce rendez-vous permettait jusqu’ici aux RH ou au manager d’informer le salarié sur ses perspectives d’évolution professionnelle et sur la validation des acquis de l’expérience, il doit désormais comporter de nouvelles informations, à savoir l’activation de son compte personnel de formation (CPF), les abondements que la société est susceptible de financer et le conseil en évolution professionnelle. Un dispositif d’accompagnement gratuit susceptible de favoriser l’évolution et la sécurisation de son parcours professionnel.
Autre nouveauté : l’entretien professionnel peut être anticipé lorsqu’il est organisé dans le cadre d’une reprise de poste après la suspension du contrat de travail (congé de maternité, congé parental d’éducation, congé de proche aidant, congé d’adoption, cogné sabbatique, période de mobilité volontaire sécurisée, période d’activité à temps partiel, arrêt longue maladie, mandat syndical). La loi réserve l’initiative de cet entretien professionnel anticipé au salarié. Cette option laissée au libre choix du salarié existait uniquement, avant la loi Avenir professionnel, lors d’un retour de congé parental d’éducation.
La sanction est également allégée pour les entreprises de plus de 50 salariés. Elle n’interviendra que si le salarié n’a pas bénéficié de tous les entretiens professionnels requis et s’il n’a pas suivi une formation non obligatoire. Les conditions de l’abondement du CPF et le montant de la somme due par l’employeur à titre de sanction seront fixés par décret. L’abondement au CPF du salarié était fixé, jusqu’à présent, par la loi à 100 heures (130 heures pour un salarié à temps partiel). L'employeur devait, en outre s'acquitter d'une pénalité financière de 3000 euros pour un temps plein et de 3 900 euros pour un salarié à temps partiel.
Un accord collectif d’entreprise ou, à défaut, de branche peut désormais définir un cadre, des objectifs et des critères collectifs d’abondement par l’employeur du compte personnel de formation des salariés. Il peut aussi prévoir d’autres modalités d’appréciation du parcours professionnel du salarié que celles prévues jusqu’ici (formation, VAE, progression salariale ou professionnelle) ainsi qu’une périodicité des entretiens professionnels autre que les deux ans fixés par la loi. A noter toutefois : la périodicité de l’entretien qui dresse un "état des lieux" ne sera pas négociable. Elle continuera d’avoir lieu tous les six ans.
Contribution unique
Surtout, la loi Avenir professionnel instaure, à partir de janvier 2019, une contribution unique à la formation et à l’alternance, composée de la taxe d’apprentissage (0,68 %) et de la contribution à la formation professionnelle (0,55 %). Cette contribution sera recouvrée par les Urssaf à partir de 2021 et non plus par les Opca.
Une période transitoire est donc mise en place. Ainsi, au titre des rémunérations versées en 2018 (versements et dépenses à effectuer avant le 1er mars 2019), la collecte de la contribution formation et de la taxe d’apprentissage dues reste assurée par les organismes collecteurs actuels (Opca et Octa notamment). Ces contributions sont collectées, contrôlées, gérées et affectées selon les dispositions légales, réglementaires et conventionnelles applicables au titre de l’année 2018.
Ensuite, au titre des rémunérations versées en 2019 et en 2020, les Opco seront chargés de collecter les fonds de la formation professionnelle et de l’alternance. A noter qu’aucune taxe d’apprentissage ne sera due au titre des rémunérations versées en 2019. A partir de 2020, la collecte a vocation à être effectuée au titre de l’année en cours.
Au plus tard, à partir du 1er janvier 2021, l’Urssaf effectuera la collecte des fonds de la formation professionnelle et de l’alternance selon des modalités fixées par ordonnance.
La contribution dédiée au financement du CPF des salariés en CDD remplace, elle, la contribution "1 % CIF-CDD".
Opérateurs de compétences
La loi Avenir professionnel remplace les organismes paritaires collecteurs agréés (Opca) par des opérateurs de compétences (Opco). Depuis le 1er janvier 2019, la Délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP) instruit les demandes d'agrément des opérateurs de compétences qui avaient jusqu'au 31 décembre 2018 pour déposer leur dossier de demande d'agrément. Un décret du 21 décembre 2018 définit les modalités d'organisation, de fonctionnement et de la procédure d'agrément des opérateurs de compétences.
Anne Bariet (ActuEL-RH) avec le Guide de la formation professionnelle continue